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L'alimentation paysanne en Vallée d’Aoste

Extrait du chapitre réalisé par Alexis Bétemps pour la publication « Alimentation paysanne en Vallée d’Aoste »

Alimentation paysanne en Vallée d'Aoste

La définition d'un plat traditionnel dans le Val d'Aoste est complexe et nécessite d'examiner le régime alimentaire des générations précédentes afin de protéger et de valoriser notre gastronomie. Les plats traditionnels représentent une importante source de revenus touristiques et un patrimoine culturel identitaire pour la population locale. Ils doivent cependant être traités avec respect et prudence. La Vallée d'Aoste a hérité de plusieurs traditions locales, comme la tradition bourgeoise ouverte aux influences des régions environnantes, qui produisaient des aliments différents de ceux des paysans. Les menus de la bourgeoisie étaient particulièrement larges et variés, avec des aliments étrangers à l'alimentation paysanne.

Les trois grandes traditions valdôtaines, bourgeoise, cléricale et paysanne, étaient en contact les unes avec les autres et fréquentaient les mêmes marchés et foires d'Aoste. Ce contact a permis aux gens d'apprendre de nouvelles habitudes alimentaires et culinaires, en les adaptant aux ressources disponibles dans leur région. Les femmes, en particulier, apprenaient à cuisiner en travaillant comme domestiques dans des familles bourgeoises et conservaient les recettes qu'elles avaient apprises pour enrichir la tradition culinaire de leur communauté. La tradition s'est ainsi enrichie d'idées et d'influences nouvelles.

« Manger avec les deux mains » est une expression du patois de Verrayes qui fait référence à une époque où la nourriture était souvent rationnée et de mauvaise qualité. Cependant, malgré les privations, les souvenirs des personnes âgées sont empreints d'une sérénité inattendue. La pauvreté du passé a permis d'accepter les souffrances endurées et d'en faire un patrimoine vécu. Le Val d'Aoste avait une approche très unifiée de la cuisine paysanne, et l'alimentation était liée à la production locale, aux disponibilités budgétaires, aux besoins de conservation, aux quelques échanges commerciaux et au troc.

Les habitants de l'amont et de l'aval pratiquaient le troc, échangeant des produits laitiers, des pommes de terre et des céréales contre des fruits, des châtaignes et des légumes qui ne poussaient pas en altitude. La culture céréalière se développait jusqu'à 1 900-2 000 mètres d'altitude et offrait de grandes terrasses qui coloraient les versants des vallées en jaune l'été. Chaque famille disposait de lait, de viande une à deux fois par semaine en hiver et de fruits tels que poires, pommes, cerises, nèfles et prunes. Dans la Basse Vallée, il existait au moins 15 variétés de châtaigniers greffés, dont la production était encore abondante jusqu'aux premières décennies du siècle dernier. On produisait du vin à partir du raisin et on récoltait de petits fruits forestiers pour faire des confitures ou des salades de fruits. Les champignons étaient pratiquement absents de la table paysanne.

La pêche dans les cours d'eau était un privilège des seigneurs et les paysans se concentraient sur la production de fromage et de beurre à partir des vaches, qui pouvaient être vendus pour acheter des marchandises telles que le sel, les épices, la viande et quelques produits de luxe comme le sucre et le café pour les femmes et le tabac pour les hommes. L'épargne était nécessaire pour développer potentiellement la propriété agricole.

Le nombre de repas quotidiens variait en fonction des saisons et des obligations professionnelles. De la Saint-Barthélemy à la Saint-Joseph, on prenait trois repas par jour. Le petit déjeuner était pris dès le lever, tandis que le déjeuner était le repas principal pris à la maison, tous ensemble. Le dîner était modeste et répétitif, avec généralement une soupe aux légumes ou au lait, du pain de seigle et du fromage maigre. Pendant la saison des foins, il y avait un goûter vers cinq heures de l'après-midi qui devenait également substantiel. En été, on mangeait de la soupe au lait avec des pâtes et/ou du riz. Il n'était pas d'usage d'inviter des amis ou des parents à manger, sauf à l'occasion de fêtes familiales.

Autrefois, la communauté organisait des moments de convivialité comme le « ressegnón » ou la « vèillà » d'hiver. On y échangeait des informations, on y racontait des histoires et des légendes. Ces moments étaient organisés pour effectuer un travail ennuyeux mais reposant. Le ressegnón était une récompense pour les jeunes qui travaillaient gratuitement pour aider les plus démunis. Les faucheurs faisaient une pause en milieu de matinée pour manger et boire du vin. Lors des corvées, les gens apportaient leur propre nourriture et mangeaient ensemble. Les vendanges étaient l'occasion d'une fête en plein air avec des plats traditionnels.