L’ors é lou petchoù bèardjé
Dén na petchouda mézòn, totta souletta ou métèn dou boûque, restèn én cretchàn avouéi son néveu. L’avén én betén de fèye a vardé, n’avé de biantse é de nére.
Lou méinò ménave le fèye vià pe lou boûque é, en carètsèn la pi patouza, dezét : « De séi bén que vou lanmeré bièn depì pequé la bonna èarba fréitse dou pro, méi salla fa la vardé pe pouéi la séyé é la entéitsé ou souléi pe vou la baillé-la pouéi lou lon de l’ivér ».
Dén lou boûque, pa bièn louèn de la mézòn, l’avé én pro avouéi na goille ou métèn. Lou petchoù bèardjé, devèn emboué, s’arétave tejoù lénque é : «… dezevouit… trentecattrou… sénquenta… », contave le fèye moustèn que s’abérén.
Én dzor que l’ére lai, vé achordre én gro ors que lé dit : « Lou boûque l’et a mè é te bétche, seu, fa pa que ch’é restèyan », é fazé de tchére coumme l’eusse voulù ataqué le fèye.
Lou bèardjé ch’é betò a lou souplié : « Na, pe piézì… épèarma mon betén, mon cretchàn é mè n’en pa d’atrou que sousoùn pe vivre ».
L’ors adòn se beutte drét su se davve patte de déréi é lé dit : « De vouéi te baillé na pousebeletó : si te endevinne mon éyadzou, d’épèarmou te fèye. Te baillou lou tens de lé pensé canque a demàn… de tournou pouéi seu a la mém’eura ».
Lou bèardjé tot épouérià va to de suitte en tché loueu é conte sen que l’è capeta-lé ou cretchàn. Lou vié ommou ch’é betò a pensé na pouza, apré l’a deut : « Méi mon petoù, tracache-té maque pa trop, te vé pouéi que n’arèvèn a lou savé ! Teteun, én gro ors sèrè pa pouéi pi fén qu’én vié ommou… Tè, vouéi l’apré marenda, torna maque coumme de couteumma, bèardjé de te fèye. En mémou ten, te rémache totte le bouvatte é én moué de petchoude ranme ».
Lou petchoù bèardjé l’a fai coumme l’a deu-lé lou cretchàn : l’a rémachà na grosa quentetò de bouvatte é de ranme é le-z-à entéitsa-le tot a l’entor de la goille.
Coque lou soulaill l’a coutsà, le-z-à totte lléte a de fiselle que l’a pouéi fai pasé d’én arbrou a l’atrou tot a l’entor de la réra dou boûque. Apré to sé travaill, l’a pensò : « Iorra d’éi pa d’atrou a fare que me catsé déréi én bouésòn é atendre ».
Quen la leunna l’è sorteuya, voualò achordre l’ors. Tot étounnò, ch’é dréchà su se davve patte de déréi é l’è restò sensa fiò :
« Que de boboroille, que de foforoille,
Magré me sent en… d’éi jamai vu de baggue sembiabe ! »
Quen la leunna ch’è catsaye lou bèardjé, que l’avé to sentù, l’a quetò sa catse é l’è tornò tché loueu to contèn : « Ah… aaah ! Mon cretchàn l’a fran avù na bonna idéye ».
Lou dzor apré l’è tornò a la goille p’abéré se bétchette é to de suitte l’et arèvò l’ors avouéi én vort da blagleu. Ch’é dréchà su se davve patte de dérèi é l’a demandò : « Adòn, sa-teu me deurre vairou d’en d’éit ? ».
« Vouai, t’a sent en, l’a répondu-lé lou méinò, é l’è l’eura que tè te t’en alèye de pèar seu ! ».
Pe la grosa radze l’ors ch’é mordù na patta é l’a pré lou veul canque ou carou dou boûque é de lénque l’è pa tornò sortì.
Alexis Bétemps, Lidia Philippot, Merveilles dans la vallée - Le Val d’Aoste conté - Collection Le miel des contes, Imprimerie Slatkine, Genève 2006.
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L'ours et le petit berger
Dans une petite maison isolée près du bois vivaient un vieil homme et son petit-fils. Ils gardaient un troupeau de moutons dont certains étaient blancs et d’autres noirs.
L’enfant menait les moutons paître dans le bois. Caressant le plus câlin il dit :« Je sais que vous aimeriez manger le frais herbage de la prairie, mais elle devra être fauché et entassé dans le fenil pour vous nourrir pendant l'hiver ».
Dans le bois, non loin de la maison, il y avait un pré avec un petit étang au milieu. Le petit berger s'arrêtait là tous les jours avant de rentrer et : « …dix-huit,… trente-quatre…, cinquante ». Il comptait ses moutons pendant qu'ils s'abreuvaient.
Un jour, alors qu'il était là, il a vu arriver un grand ours: « Le bois est mon domaine et tes bêtes n'ont rien à faire ici ! » dit l’ours en faisant mine d’attaquer les moutons.
Le berger donc le supplia : « Je t'en prie, épargne mon troupeau ! Mon grand-père et moi, nous n'avons que cela pour vivre ».
L'ours alors se dressa sur ses pattes de derrière et dit: « Je veux bien te donner une chance. Si tu devines mon âge, j'épargnerai tes moutons. Tu peux y penser jusqu'à demain, je reviendrai ici à la même heure ».
Le berger affolé rentra aussitôt, et il raconta son aventure à son grand-père. L'aïeul réfléchit un instant, avant de dire : « Ne t'en fais pas, mon petit, nous l'aurons ! D'ailleurs, il n'est pas dit que gros ours soit plus malin que vieil homme... Cet après-midi tu vas, comme d'habitude, faire paître le troupeau dans le bois ; entre temps, tu ramasseras toute les pommes de pin que tu verras et tu couperas des branchettes feuillues à tous les aulnes que tu trouveras ».
Le petit berger fit comme avait dit son grand-père, il ramassa des quantités de pommes de pin et de branchettes feuillues qu'il amoncela au bord de la mare et au coucher du soleil, il les attacha à des ficelles qu'il tendit d'un arbre à l'autre, autour de la clairière. Après tout ce travail, il pensa : « Maintenant il ne me reste rien d’autre à faire que de me cacher derrière un buisson et attendre ».
Quand la lune se leva, l'ours apparut. Surpris, il se dressa sur ses pattes de derrière et resta bouche bée : « Que de boboroille... Que de foforoille... Malgré mes cent ans, je n’en ai jamais vu autant ! ».
Quand la lune se coucha, le berger, qui avait bien entendu, quitta sa cachette et revint chez lui tout content : « Ah aaah, mon grand-père a vraiment eu une grandiose idée ! ».
Le lendemain, il alla à la clairière abreuver ses moutons. Aussitôt, l'ours arriva en se dandinant. Il se leva sur ses pattes de derrière et demanda: « Alors, sais-tu me dire quel est mon âge? ».
« Tu as cent ans, lui répondit le garçon, et il est temps que tu t'en ailles! ».
De rage l'ours se mordit une patte et s'enfuit au fond du bois d'où il ne revint jamais plus.
Tiré de : Alexis Bétemps et Lidia Philippot, Merveilles dans la vallée - Le Val d’Aoste conté - Collection «Le miel des contes», Imprimerie Slatkine, Genève 2006
L'ours et le petit berger
Dans une petite maison isolée près du bois vivaient un vieil homme et son petit-fils. Ils gardaient un troupeau de moutons dont certains étaient blancs et d’autres noirs.
L’enfant menait les moutons paître dans le bois. Caressant le plus câlin il dit :« Je sais que vous aimeriez manger le frais herbage de la prairie, mais elle devra être fauché et entassé dans le fenil pour vous nourrir pendant l'hiver ».
Dans le bois, non loin de la maison, il y avait un pré avec un petit étang au milieu. Le petit berger s'arrêtait là tous les jours avant de rentrer et : « …dix-huit,… trente-quatre…, cinquante ». Il comptait ses moutons pendant qu'ils s'abreuvaient.
Un jour, alors qu'il était là, il a vu arriver un grand ours: « Le bois est mon domaine et tes bêtes n'ont rien à faire ici ! » dit l’ours en faisant mine d’attaquer les moutons.
Le berger donc le supplia : « Je t'en prie, épargne mon troupeau ! Mon grand-père et moi, nous n'avons que cela pour vivre ».
L'ours alors se dressa sur ses pattes de derrière et dit: « Je veux bien te donner une chance. Si tu devines mon âge, j'épargnerai tes moutons. Tu peux y penser jusqu'à demain, je reviendrai ici à la même heure ».
Le berger affolé rentra aussitôt, et il raconta son aventure à son grand-père. L'aïeul réfléchit un instant, avant de dire : « Ne t'en fais pas, mon petit, nous l'aurons ! D'ailleurs, il n'est pas dit que gros ours soit plus malin que vieil homme... Cet après-midi tu vas, comme d'habitude, faire paître le troupeau dans le bois ; entre temps, tu ramasseras toute les pommes de pin que tu verras et tu couperas des branchettes feuillues à tous les aulnes que tu trouveras ».
Le petit berger fit comme avait dit son grand-père, il ramassa des quantités de pommes de pin et de branchettes feuillues qu'il amoncela au bord de la mare et au coucher du soleil, il les attacha à des ficelles qu'il tendit d'un arbre à l'autre, autour de la clairière. Après tout ce travail, il pensa : « Maintenant il ne me reste rien d’autre à faire que de me cacher derrière un buisson et attendre ».
Quand la lune se leva, l'ours apparut. Surpris, il se dressa sur ses pattes de derrière et resta bouche bée : « Que de boboroille... Que de foforoille... Malgré mes cent ans, je n’en ai jamais vu autant ! ».
Quand la lune se coucha, le berger, qui avait bien entendu, quitta sa cachette et revint chez lui tout content : « Ah aaah, mon grand-père a vraiment eu une grandiose idée ! ».
Le lendemain, il alla à la clairière abreuver ses moutons. Aussitôt, l'ours arriva en se dandinant. Il se leva sur ses pattes de derrière et demanda: « Alors, sais-tu me dire quel est mon âge? ».
« Tu as cent ans, lui répondit le garçon, et il est temps que tu t'en ailles! ».
De rage l'ours se mordit une patte et s'enfuit au fond du bois d'où il ne revint jamais plus.
Tiré de : Alexis Bétemps et Lidia Philippot, Merveilles dans la vallée - Le Val d’Aoste conté - Collection «Le miel des contes», Imprimerie Slatkine, Genève 2006